Le Prince Albert II de Monaco s’associe à la Commission océan mondial et au PNUE en plaidant pour une Gouvernance globale des océans
Monaco
Nairobi, le 26 juin 2014 – Le sort des milieux marins de notre planète est en jeu, d'autant que les périls nés de l'activité humaine se font de plus en plus pressants. Voilà pourquoi les défenseurs des océans, dont Son Altesse Sérénissime le Prince Albert II de Monaco et d'anciens chefs d'État, des ministres et des chefs d’entreprise de la Commission océan mondial, ont lancé un appel collectif et retentissant en faveur d'une gouvernance des océans globale et intégrée.
Cet appel urgent a été lancé au cours de la toute première Assemblée des Nations Unies pour l'environnement (UNEA), à Nairobi. Le Prince Albert, un militant écologiste primé, y a abordé la multitude de menaces pesant sur les océans, notamment la pollution, la surpêche et le changement climatique, dont les effets sont grandissants.
Au niveau mondial, 350 millions d'emplois seraient liés aux océans, et près de 40 % de la population mondiale vit à moins de 100 kilomètres d'un rivage. Toutefois, les activités humaines ont abouti à la destruction d'environ 20 % des mangroves et 30 % des herbiers marins. Elles menacent par ailleurs 60 % des récifs coralliens de la planète, qui constituent une source de revenus considérable pour quelque 850 millions de personnes.
Les activités humaines sur terre ont par ailleurs entraîné la formation de plus de 500 « zones mortes » pauvres en oxygène, qui couvriraient 245 000 kilomètres carrés de zones côtières. Les émissions de gaz à effet de serre conduisent à une hausse du niveau des mers, menaçant l'existence même de certains États insulaires.
« Les milieux marins de notre planète fournissent toute une palette de services cruciaux pour l'humanité, qu'il s'agisse de l'air que nous respirons, de la sécurité alimentaire ou d'une protection contre les intempéries. En outre, la vie de nombreuses personnes à travers le monde, et leurs moyens de subsistance, reposent sur ces milieux », a déclaré le Prince Albert.
« Néanmoins, les menaces pesant sur les océans (pollution provenant de sources terrestres, surpêche et développement excessif des côtes) risquent de s'aggraver, sans compter que la population mondiale devrait passer de sept à neuf milliards d'ici 2050. La communauté internationale doit utiliser comme tremplin l'« Avenir que nous voulons », adopté à Rio en 2012, et mettre à profit l'opportunité que représente l'économie bleue. Des océans productifs et résilients sont essentiels au développement socioéconomique », a-t-il ajouté.
Achim Steiner, Secrétaire général adjoint des Nations Unies et directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE), a souligné que le respect plus strict de l'actuel régime de gouvernance régionale des océans est nécessaire pour enrayer la dégradation effrénée des océans, ce que soutient depuis 40 ans le Programme des mers régionales du PNUE.
Le Programme des mers régionales, qui fête cette année son 40e anniversaire, est le seul cadre juridique au monde à traiter des questions maritimes au niveau régional. Son réseau de 18 Conventions et Plans d'action régionaux vise à faire participer des pays voisins à des actions globales et ciblées, afin de protéger le milieu marin qu'ils partagent.
Près de 150 pays répartis sur sept continents participent aux Conventions et aux Plans d'action sur les mers régionales.
« Les océans ont beau être de puissants moteurs de croissance économique, ils ne sont pas pour autant une ressource illimitée », a ajouté M. Steiner. « Il est avéré que nous risquons d'aller au-delà de « l'espace de fonctionnement sécurisé », après quoi des changements irréversibles dans les océans de notre planète sont à prévoir ».
« Il est grand temps que la communauté internationale embrasse une véritable économie « axée sur les océans », qui apprécie à leur juste mesure nos océans et les produits et services qu'ils fournissent », a-t-il ajouté. « Le Programme des mers régionales du PNUE, qui est à l'avant-garde d'une gestion progressiste des océans depuis plus de quarante ans, constitue le cadre permettant à des pays voisins d'unir leurs forces et de réparer les dommages terribles provoqués par l'être humain ».
Aux côtés du Prince Albert et de M. Steiner se trouvait José María Figueres, ancien Président du Costa Rica et coprésident de la Commission océan mondial. La Commission regroupe d'éminents responsables politiques, des chefs d'entreprises et des spécialistes du développement s'intéressant à la santé et à la gestion des océans, notamment de la haute mer. La Commission a passé les 18 derniers mois à enquêter sur le déclin des océans de la planète, et a publié en début de semaine un plan de sauvetage contenant huit propositions pour rétablir et protéger son capital et ses services naturels.
« Qui le fera, sinon nous ? Et quel meilleur moment que maintenant ? Les océans nous sont vitaux, mais notre incurie et la surexploitation exercent sur eux une telle pression que nous approchons du point de non-retour », a affirmé M. Figueres. « Nos propositions comprennent un plan de sauvetage intégré ; il incombe désormais à tous les membres de l'UNEA d'être à l'avant-garde de sa mise en œuvre. Les arguments scientifiques, économiques et éthiques sont sans équivoque. Pour chacun de nous, la « Mission océan » commence ».
La pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), dont on connaît bien les énormes répercussions écologiques, économiques et sociales, est l'une des principales questions abordées dans le rapport de la Commission. La pêche INN est également liée aux violations des droits humains et du travail, lorsque des navires illégaux prennent part à la traite des personnes et au trafic de drogues et d'armes.
Le manque à gagner pour l'Afrique subsaharienne dû à la pêche illégale dans ses eaux atteindrait près d'1 milliard de dollars par an. L'Afrique de l'ouest est l'une des régions les plus touchées par les activités de pêche INN, qui concernerait un tiers voire la moitié des prises.
Selon le nouveau rapport de la Commission, la pêche INN peut être combattue par une application plus stricte des mécanismes de gouvernance des océans existants, tel que l'Accord sur les mesures du ressort de l'État du port de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). L'accord oblige les parties à renforcer leur contrôle sur les navires battant pavillon étranger, maintenant ainsi à l'écart des marchés mondiaux les poissons pêchés illégalement.
À l'UNEA, M. Figueres et la Commission océan mondial ont enjoint les participants à s'engager à agir sur la base de leurs propositions, par exemple en ratifiant l'Accord sur les mesures du ressort de l'État du port. M. Figueres a ajouté que seules 14 ratifications supplémentaires étaient nécessaires pour que l'accord entre en vigueur, ce qui contribuerait grandement à mettre un terme à la pêche illégale au niveau mondial.
Le rapport de la Commission exhorte par ailleurs à ratifier et mettre en œuvre les traités de l'Organisation maritime internationale garantissant la sécurité de la vie en mer pour les employés des navires de pêche industriels, l'élimination des subventions à la pêche néfastes et la réduction des émissions de gaz à effet de serre, à l'origine du changement climatique ainsi que de l'acidification des océans.
En effet, les chiffres confirment de plus en plus l'existence d'un lien entre une gestion non pérenne des océans et des répercussions socioéconomiques à long terme. Selon le nouveau document du PNUE sur la Gouvernance régionale des océans, le principal défi réside dans le fait que les instruments de gouvernance des océans existants ont été conçus séparément, et ne sont pas complémentaires.
La Gouvernance régionale des océans est du ressort des Conventions et des Plans d'Action des mers régionales, tandis que la gouvernance des océans au niveau mondial est consacrée dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982, parfois appelée « constitution des océans ».
D'après la Gouvernance régionale des océans, pour qu'une forme de gestion des océans soit holistique (ce qu'avait explicitement demandé le sommet de Rio de 1994), elle doit être intégrée aux niveaux national, sous-régional, régional et mondial, et aborder des enjeux sectoriels et intersectoriels.
À cet égard, les Conventions et les Plans d'Action sur les mers régionales constituent un socle permettant d'agir et de mieux apprécier les services rendus par les océans et les écosystèmes de la planète, lesquels impliquent de nombreux secteurs.
À titre d'exemple, le Programme des mers régionales appelé Convention d'Abidjan (basé à Abidjan, Côte d'Ivoire) a commencé à étudier, lors de plusieurs décisions récentes, la faisabilité des « taxes vertes » sur les industries extractives et polluantes, compte tenu de l'importance des ressources naturelles, du secteur minier et des minerais présents dans les eaux et les zones côtières des États parties à la Convention.
Notes aux rédacteurs :
Quelques données complémentaires :
Les activités humaines entraînent chaque année le rejet d'environ 120 millions de tonnes d'azote réactif, dont les deux tiers polluent au bout du compte l'air, l'eau, les sols et les zones marines et côtières, tout en apportant dans l'atmosphère des gaz néfastes.
Chaque kilomètre carré d'océan contiendrait 73 000 morceaux de plastique flottant à la surface (Banque mondiale).
Quelque 20 millions de tonnes de phosphore sont extraites chaque année, dont près de la moitié (8 fois le taux de pénétration naturel) pénètre dans les océans.
Au niveau mondial, le poisson compte pour près de 20 % de la consommation de protéines animales d'environ 3 milliards de personnes, et environ 15 pour cent de ces protéines pour 4,3 milliards de personnes (FAO).
La plupart des stocks des dix principales espèces halieutiques (qui représentent au total environ 30 % de de la production des pêches de capture marines) sont exploités au maximum : la production ne peut donc être augmentée (FAO).
Le potentiel techniquement exploitable pour les énergies renouvelables en mer (en excluant les éoliennes extraterritoriales) va de 7 exajoules (EJ) par an à 7 400 EJ par an ; ce dernier chiffre dépasserait les besoins énergétiques actuels au niveau mondial.
La gestion durable des engrais permettrait de baisser le coût de la pollution maritime d'environ 100 milliards de dollars par an pour la seule Union européenne.
Le volume total de glace de mer dans le bassin arctique est au plus bas, et les projections actuelles laissent penser que l'océan Arctique sera libre de glace durant les mois d'été dès 2025-2030.
Informations supplémentaires
Pour plus d'informations, veuillez consulter le site Internet du Programme des mers régionales du PNUE : melissa.gorelick@unep.org